Lors de la récente présentation du plan « ma santé 2022 », une mesure a suscité de nombreux commentaires : il s’agit de la fin programmée du numerus clausus dans les études de médecine, c’est-à-dire de la limitation du nombre d’étudiants admis à poursuivre leurs études à l’issue du concours de la fin de la première année. Celle-ci devrait intervenir dès la rentrée 2020. C’était aussi une promesse de campagne du président de la République, qui l’avait jugé alors « inefficace », « périmé » et « injuste ». Pourquoi cette suppression était-elle attendue ?
Le numerus clausus, un outil devenu obsolète
Le numerus clausus ne remplissait plus qu’en partie sa fonction, qui est de contingenter l’accès à la profession de médecin. Apparu en 1971, il avait pour vocation initiale de freiner les dépenses de santé, suivant l’idée qu’un nombre élevé de praticiens entraînerait une inflation des actes et donc des remboursements. C’est ainsi que son niveau a rapidement baissé à partir de la fin des années 70, jusqu’à ce que l’on s’avise d’une potentielle pénurie de médecins à venir.
En pratique, ce contingentement n’a pas vraiment eu l’effet souhaité, les dépenses de santé ne cessant d’augmenter. Cependant, comme le rappelle le chercheur Marc-Olivier Déplaude, spécialiste du sujet, tant l’Assurance-maladie que les syndicats de médecins le défendaient jusqu’à la fin des années 90, notamment parce qu’il permettait de limiter la concurrence entre praticiens.
Mais les règles ont changé depuis du fait de la libre circulation des travailleurs dans l’Union Européenne (UE) : les médecins venant d’autres pays de l’UE ont désormais le droit de s’installer librement en France, et un quart des médecins qui s’installent nouvellement dans notre pays ont un diplôme étranger. Les étudiants recalés en France peuvent ainsi se former en Belgique, en Espagne ou encore en Roumanie pour contourner le numerus clausus. Il n’y avait donc plus guère de sens à le maintenir.
Une fin toute relative
Pour autant, sa suppression à brève échéance ne signifie évidemment pas que tous ceux qui le souhaitent pourront devenir médecins. Le nombre de médecins en France est globalement dans la moyenne des pays européens – les déserts médicaux résultent essentiellement d’un problème de répartition, avec des régions trop dotées et d’autres insuffisamment pourvues. Surtout, les universités et les hôpitaux universitaires sont très loin de disposer des capacités d’accueil suffisantes pour former un contingent d’étudiants qui augmenterait de façon importante.
Deux pistes avaient donc été évoquées avant les annonces récentes :
- Déplacer la sélection en troisième année, c’està-dire à la fin de la licence. Les étudiants recalés valideraient donc au passage un diplôme en santé au lieu de repartir de zéro ou presque après deux années de concours éreintantes, comme dans le système actuel. Les réorientations seraient alors facilitées. Le problème de la capacité d’accueil des universités rend cette solution difficilement envisageable dans l’immédiat ;
- Transformer le plafond en plancher, pour favoriser une adaptation aux besoins réels du territoire. Les étudiants de médecine de troisième cycle s’installent en effet majoritairement dans leur région de formation. Les universités proches de déserts médicaux pourraient donc moduler à la hausse leur nombre d’admis pour résoudre ces difficultés. A condition là encore d’en avoir les moyens, notamment en matière de capacité d’accueil en stage dans les structures sanitaires locales.
Quels seront les réels changements ?
Si le gouvernement a confirmé la suppression de la PACES, il a aussi refusé la création d’une licence en santé. Les modalités concrètes du nouveau cursus de médecine restent donc à définir, une concertation étant actuellement en cours entre les différents acteurs (universités, organisations d’étudiants, ministère de l’Enseignement supérieur, etc.). Il s’agirait notamment, ainsi que l’indiquait en février dernier la ministre de la Santé, « de diversifier les façons d’entrer dans le cursus de santé », en multipliant les passerelles entre cursus universitaires. L’entrée en médecine pourrait donc intervenir plus tard, comme le permettent d’ailleurs déjà les passerelles existantes pour rentrer en deuxième ou troisième année (ces dispositifs restent cependant très marginaux à l’heure actuelle).
En fin de compte, il est donc plus pertinent de parler d’assouplissement du numerus clausus que de réelle suppression : le nombre global de médecins formés ne devrait pas exploser dans les prochaines années. Rendez-vous au printemps prochain, donc, pour savoir quelle forme prendront les futures études médicales.
Pour en savoir plus :
Un article synthétique de la DREES, la direction des études statistiques du Ministère de la Santé, sur le numerus clausus (5 pages) ;
Un article universitaire pointu sur le sujet (23 pages), qui étudie en détail l’évolution du numerus clausus depuis 1971 (revue d’histoire de la protection sociale).
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